Quelques pages de bande dessinée de temps en temps.

Une critique essayant d'être intéressante à cette occasion.

Un aspect particulier de la bande dessinée à chaque critique.


jeudi 3 décembre 2015

La bande dessinée est remplie de personnages expressifs.

Aude  Picault nous explique pourquoi le dessin réaliste est un chemin semé d'embûches.

Aude Picault, Fanfare, Delcourt - Shampooing.

ON NE PARLE PAS ASSEZ DE ROBOTIQUE DANS LA VIE.

Il existe en robotique la théorie de la « uncanny valley » (ou « vallée dérangeante », en french) qui explique que les utilisateurs de robots sont à l'aise avec des robots clairement artificiels (façon Wall-E) ou parfaitement réalistes (façon Terminator) (et pour cause, je vous file le truc : en fait, dans Terminator, c'est un vrai acteur qui joue, pas un robot) (je sais, j'ai cassé le mythe), mais que, entre les deux, quand on en arrive à avoir des robots très réalistes qui ne sont pas capables de reproduire des comportements humains reconnaissables, il s'installe un malaise chez l'utilisateur.

WALL-E CONTRE LES PÉDOPHILES.

On s'attache à Wall-E, parce que malgré son schématisme, on reconnaît des réactions humaines chez lui. On s'attache à Terminator, puisqu'on a tous rêvé un jour d'être un robot venant du futur avec un accent autrichien. Mais on s'attache beaucoup moins à un truc qui ressemble à un humain autiste-botoxé-nazi-pédophile, quelqu'un qui semble avoir un mal fou à exprimer ses émotions au travers de ses mimiques et fait tout de travers. (Heureusement, pour les nazis, ça va changer après les prochaines élections, et ils pourront enfin s'exprimer à nouveau contre la bien-pensance de notre monde bobo déliquescent.)

Ce robot semble vouloir rire à une de mes blagues et, pourtant, 
je lis dans son regard qu'elle voudrait me violer très fort avec une lance de garde. Il y a un décalage.

Cette idée de vallée dérangeante a été reprise depuis une dizaine ou une quinzaine d'années dans le domaine de l'animation par ordinateur et de la course au réalisme dans les effets spéciaux.

ROBOT AUTRICHIEN CONTRE JAPONAISE SEXY.

Au départ, c'était surtout pour dire que la course au réalisme était peut être inutile, parce qu'on n'avait pas encore les capacités de calcul nécessaires pour rendre toutes les mimiques d'un visage humain. 

Dans Final Fantasy (un film de 2001),  les animateurs ont évité le problème en ne donnant (presque) aucune mimique aux personnages. (Et en essayant de nous faire le coup de « ce sont trop des êtres blessés qui souffrent en dedans ».) (Mais c'était raté.)

C'est pour ça que dans Terminator 2, quand le méchant est dessiné en effets spéciaux numériques, il est tout informe. Parce ce que ça ne servait à rien de se faire suer à essayer de le rendre réaliste pour qu'ensuite le spectateur n'y croie pas une seconde. Soit on fait jouer un vrai acteur, soit on fout des images de synthèse très schématiques, mais on n'essaye pas d'aller entre les deux. 

Le film contourne donc expressément cette fameuse « uncanny valley » avec laquelle je vous casse les pieds depuis tantôt.

Attention toutefois à ne pas confondre « vallée dérangeante » et « acteur qui joue mal ».
(Ici, le réalisateur profite magnifiquement de cette ambiguïté.)

DE NOS JOURS.

La vallée dérangeante est plus évoquée pour expliquer que, certes on dispose des ordinateurs nécessaires à faire une animation correcte, mais comme on va tout délocaliser l'animation en Corée du Nord en leur foutant des délais impossibles, ça va être super moche et non seulement dérangeant mais aussi insultant pour le spectateur.

Donc autant essayer de faire un personnage moins réaliste, mais qui va ressembler à quelque chose.

C'est pour ça qu'on peut compter les pores de la peau de Shrek, mais qu'il garde un gros nez et des oreilles en trompette.

C'EST BIEN GENTIL TOUT ÇA, MAIS ON N'ÉTAIT PAS SUR UN BLOG DE BANDE DESSINÉE À LA BASE ?

Hé oui !

Mais justement !!

La bande dessinée est confrontée aux mêmes problématiques !!!

Est-ce que ce n'est pas complètement et immensément dingue !!! ? (Non ?)

SOIT UN DESSIN EST RÉALISTE, SOIT IL NE L'EST PAS.

(Jusque là, je crois qu'on part sur de bonnes bases.)

POUR CE QUI EST DU DESSIN RÉALISTE.

Le dessin réaliste...

Le dessin réaliste.

Bon bhé je dois bien faire mon coming out. Le dessin réaliste, moi (à mon humble avis) (je ne suis qu'un ver de terre regardant une étoile), c'est quand même pas la voie à favoriser en bande dessinée, et, ce, pour toutes les raisons évoquées plus haut.

Si on choisi un dessin réaliste, il faut qu'il soit tellement parfait pour pouvoir exprimer quelque chose, que très peu de dessinateurs peuvent se le permettre.

Bon, bien sûr, après, on peut aussi s'appeler Moebius, et ça règle beaucoup de problèmes.

Hélas, peu de dessinateurs s'appellent Moebius, et, en général, ceux qui choisissent la voie du réalisme tombent soit dans le travers de la vallée-dérangeante-qui-fait-peur (tomber dans le travers d'une vallée, c'est vraiment pas de bol) soit dans celui de la non-expressivité-si-le-personnage-n'exprime-rien-il-ne-peut-pas-faire-peur.

Largo Winch est un bel exemple de personnage inexpressif-parce-que-réaliste. C'est un peu le Final Fantasy à la française (claaaaasse) (j'essaye de me rattraper comme je peux). On rend son visage le moins expressif possible, et après on essaye de faire ressentir que c'est un homme blessé et courageux. Blessé et courageux, en dedans de lui, hein. Ce serait trop bête d'essayer d'exprimer quelque chose avec le dessin.

Pauvre Largo, le sort s'acharne, ça tombe sur lui alors qu'il a déjà perdu son père. Je suis vraiment pas gentil.

Le cycle de Cyan est un bel exemple de personnage expressif-mais-elle-devrait-pas-parce-que-ça-file-les-chocottes-quand-même. C'est un peu le robot autiste pédophile nazi à la française (claaaas... euh... non.). On rend son visage expressif, mais comme cette expression est mal maîtrisée et en décalage avec ce qu'on a l'habitude voir dans notre vraie vie de vrais gens, on a plus ou moins l'impression de se retrouver face à un monstre de Lovecraft (fasciné et répulsé en même temps).

Fascination face aux gros nichons, mais, en même temps, peur face aux regards vides qui font penser que ce sont peut-être 
des mantes religieuses géantes aliens de l'espace déguisées dans des enveloppes humaines. 

MEA CULPA.

Je dois quand même faire remarquer que j'ai choisi, comme exemples de bandes dessinées aux dessins (selon moi) contestables, deux séries à grand succès. Ce qui montre que je suis peut être bien le seul à être dérangé par ces dessins, et, que, s'il faut, bien à l'aise dans ma bulle bobo-gaucho-intello je raconte n'importe quoi sur ce blog depuis des lustres.

Je me réjouis donc que les prochaines élections puissent me permettre de m'extirper de cette bulle de confort intellectuel illusoire en me confrontant au vrai monde des vraies gens qui n'ont besoin ni de planning familial, ni de cerveau.

Ceci précisé, revenons à nos moutons. 

POUR CE QUI EST DU DESSIN NON-RÉALISTE.

Un dessin peu ou pas réaliste va se gérer exactement comme un Wall-E.

Ça ressemble à rien et ça réussit à nous faire chouiner.

On va exagérer les aspects reconnaissables et expressifs du visage (les yeux, la bouche) (bon, OK, Wall-E n'a pas de bouche) (mais il a de TRÈS grands yeux, ça compense) (juste l'inclinaison des yeux fait la moitié de l'expressivité de Wall-E) et du corps (les bras, la posture générale du corps) pour que le spectateur et le lecteur puisse reconnaître ses mimiques et se reconnaître dans ses mimiques.

Wall-E, cet être qui sait nous émouvoir avec son corps (non, on ne parle pas de porno).

CE QUE FAIT ÉGALEMENT AUDE PICAULT.

Deux yeux, une bouche, et c'est parti mon kiki.

En réduisant tout ses personnages aux quelques traits nécessaires pour représenter un visage (deux-yeux-une-bouche, donc) (et les cheveux pour faire design) et un corps (l'important n'est pas le corps en soit mais sa posture, qui va exprimer un sentiment ou un état) (exactement comme l'inclinaison des yeux de Wall-E nous font comprendre qu'il est triste, amusé, déterminé, etc), paradoxalement, Aude Picault rapproche ses personnages de nous, en nous faisant reconnaître dans ces fameuses postures et expressions faciales nos propres émotions.


Les quelques traits permettent paradoxalement de bien isoler et comprendre les expressions et les sentiments que traverse le personnage.

Dans le cas d'un dessin plus réaliste, il y aurait plus de traits à interpréter, et il serait plus compliqué de décrypter directement le sentiment reflété sur le visage du personnage.

Concupiscence, volonté d'action, ou rétention anale, difficile de trancher.

À noter que, en jouant comme un pied dans un grand moment d'actors studio, 
Tomer Sisley a décidé d'adopter le même regard flou que notre héros de papier.

La simplicité du trait permet de nous communiquer les sentiments des personnages et de nous toucher bien plus rapidement.

ET CE QU'ELLE FAIT POUR LES VISAGES, ELLE LE FAIT AUSSI POUR LES CORPS.


Je vais pas trop me répéter, parce que le concept est exactement le même : en limitant le nombre de traits, Aude Picault rend le lecteur beaucoup plus sensible à la moindre variation de ces quelques traits. Ce n'est pas un super pouvoir : il s'en rend tout simplement plus facilement compte.

Là encore, pour le visage comme pour le corps, très peu de traits. Les objets les plus complexes de l'image sont le trombone et l'escalier, c'est dire... Le personnage est quasiment résumé à une silhouette à tutu.

La déception que l'on lit chez le personnage principal ne vient pas de son regard, mais du très léger affaissement de son épaule.

Épaule carrée / épaule plus proche de sa brettelle et ronde = déception.

Le corps des personnages de Aude Picault est donc utilisé pour représenter leurs sentiments ou leurs états, ou leurs états d'esprit.

MAIS PAS QUE !

Ce corps est aussi utilisé pour rendre crédibles toutes ces émotions qui traversent toutes ces têtes et tous ces corps.

COMMENT ?

Grâce à la gravité.

CE QUE NOUS VERRONS LA SEMAINE PROCHAINE.

15 commentaires:

  1. Ah, Bourgeon ! Oui, je le lis depuis tout jeune, et pourtant je n'arrive toujours pas à me faire à sa manière de traiter les visages de ses personnages. A ça, et à sa manie d'insérer une page de "t-shirts mouillés" dans chaque album ainsi que de dessiner TOUJOURS la MÊME femme-forte-et-libérée brune aux yeux bleue, que ce soit au moyen-âge (Yuna, Brunelle), à l'époque moderne (Ysa) ou dans un lointain futur (Cyann). Après, bon, son style est cohérent avec la précision entomologique avec laquelle il retrace chaque détail de l'époque qu'il dépeint, allant jusqu'à faire des maquettes de bâtiments ou de véhicules pour créer ses cadrages et ses scènes. Cyann est d'autant plus exemplaire que dans cette série il ne s'agit plus d'Histoire, mais d'une S-F "Hard Science" qui ferait passer "Interstellar" pour "Planète Interdite". Désolé de faire mon gros fanboy, mais je suis très vexé de voir le Cycle de Cyann comparé à Largo Ouinche !

    Oh, et puis dans le genre "Euncanie vallée" (et également dans la SF "Hard Science") vous pouviez également citer le dessin chirurgical de LEO, avec sa manie de ne JAMAIS dessiner de lueur dans les yeux de ses personnages détaillés au poil près. Personnellement, ça me glace le sang.

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    1. C'est bien vrai que les univers de Bourgeon sont très détaillés. Mais c'est également bien vrai qu'il a un dessin euh... très personnel. De toute manière, moi, ce qui me coince, c'est que j'ai toujours trouvé ça super sexiste, avec toutes ces femmes à fortes poitrines toutes cambrées. On dirait des supers héroïnes Marvel. Ceci dit, c'est beau de faire perdurer la tradition Glénat par delà les années 80. ça devait être fait. Bourgeon se dévoue. Je dis bravo.

      Concernant Léo, je trouve que c'est encore autre chose, on passe à un autre stade. Il y a non seulement les yeux de poisson mort, mais également des postures de corps qui font penser à la souplesse des pantins articulés en bois. Ceci dit, c'est beau de faire perdurer la tradition des dessins tous raides d'enfants de 7 ans (allez, 10 ans, je suis de bonne humeur ce matin).

      (On me fait remarquer que je suis très très très méchant. C'est vrai. Ceci dit, c'est beau de faire perdurer la tradition d'orangina rouge sanguine sur ce blog.)

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  2. Bonjour,
    Pour le coup je trouve que la démonstration biaisée, Francq et Vance sont des dessinateurs de personnages inexpressifs, à mon avis sans que ce soit lié au fait qu'il bossent dans la veine réaliste. Ce n'est clairement pas leur priorité ni leur point fort. Mais par exemple si on prend un dessinateur comme Breccia http://i60.servimg.com/u/f60/12/60/69/19/ezrq-w10.jpg difficile de dire qu'il n'est pas expressif pourtant c'est bien du réalisme (et personnellement ça me touche plus que les visages d'Aude Picault, parce que bon les smiley eux aussi sont expressifs c'est pas pour ça qu'ils me touchent (C'est un peu de la méchanceté gratuite je vous l'accorde mais quand même, ces visages guimauves qui changent d'expression à chaque case pour moi c'est un peu trop) ).

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    1. Oui, oui, je suis d'accord : c'est possible de très bien dessiner en réaliste. Seulement, c'est beaucoup plus difficile. Breccia. Ok. Moebius. Ok. Mais on ne parle pas des premiers perdreaux de l'année quand même...

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  3. Mmouais, pas convaincu non plus par cette démonstration. Du style minimaliste, on en a déjà vu beaucoup ailleurs, et bien mieux foutu que les "dessins enfantins" d' Audee... Et le monde des blogueuses BD en est un bon réservoir.
    Sempé aussi œuvrait dans ce style, mais l'élégance en plus.
    Et pour le dessin réaliste, Vance ou Francq sont de bons metteurs en images, même si leurs personnages sont souvent froids. Ils sont quand même au-dessus du tout-venant "BD réaliste" sans charme ni originalité, qui encombre les rayonnages.
    Et effectivement, les génies tels que Breccia plannent encore bien plus haut :)

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    1. Ooops, je voulais écrire Aude (pas Audee), et je précise aussi que je reste hermétique au dessin de Bourgeon dont je n'ai jamais réussi à lire un album. Il y a aussi peu de vie dans ses humains que chez 'Leo", mais il faut croire que ça ne dérange pas la grande majorité des lecteurs !

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    2. Pour ce qui est d'être au-dessus du tout venant des BD réalistes, je veux bien. On royaume dess aveugle, les borgnes sont rois, je veux bien. Mais on n'en reste pas moins borgne. ça aide pas pour dessiner les perspective. C'est relou.

      Pour ce qui est de dire que Aude Picault dessine comme un pied et que mon gosse de 4 ans peut faire pareil, je suis carrément surpris de lire ce genre de commentaire. Son trait est beaucoup plus élégant et beaucoup plus technique que la plus part des auteurs actuels (Vance et Francq en tête). Mais on rediscutera peut être de ça la semaine prochaine, quand j'aurai essayé d'expliquer pourquoi (je dis pas que je vais réussir, mais je vais au moins essayer).

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  4. Pour ce qui est de dire que Aude Picault dessine comme un pied et que mon gosse de 4 ans peut faire pareil, je suis carrément surpris de lire ce genre de commentaire.

    Surtout quand il n'a pas été écrit ;) :) :), pour être plus nuancé dans les exemples choisit si on peut dire que Largo Witch a un balai dans le c*l, on peut aussi trouver que le personnage de Picauld surjoue, c'est pas de faire passer un personnage par toutes les expressions du spectre émotif humain dans une case qui en fait quelque chose de forcément pertinent. Et surtout je pense que vouloir choisir un camps est absurde ce sont deux approches différentes avec chacune leurs qualités et leurs défauts et qui racontent des choses différentes. Vouloir les opposer me semble forcément tenir du parti pris.

    Notamment quand on dit que le dessin minimaliste est plus simple que le dessin réaliste, là en tant que dessinateur je rigole, parce que n'est pas Moebius qui veut mais n'est pas non plus Hergé qui veut. Le dessin minimaliste réclame une synthèse et une exigence aussi importante que le dessin réaliste, simplement c'est une autre voix.

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    1. Bon, je veux bien admettre que je suis un brin excessif sur la segmentarisation entre dessin réaliste et dessin qui a un intérêt ; mais c'est bien parce que vous avez dit du mal de Largo Winch.

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  5. M'sieur l'Zouave Anfré (faisons des mixtes de noms, c'est plus rigolo), faites attention à ne pas trop instrumentaliser votre magnifique blog afin de faire passer votre volonté politique aux seins des têtes les plus bondes de nos chers enfants. Peut-être qu'un enfant non-voulu-mais-plus-d'avortement-alors-bon-on-peut-pas-le-tuer-c'est-interdit lira un jour ces lignes et se découvrira une réelle volonté à devenir un robot venu du futur avec un accent autrichien. C'est dangereux pour tous les Sarah Connor du monde. Vous voulez créer un sarahconnoricide ?

    Je n'ai pas pu m'empêcher de repenser à Crossed lorsque lui-même parle de la vallée dérangeante. Et je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Scott McCloud lorsque lui-même parle de ne réduire un personnage qu'à une simplification des traits les plus expressifs afin d'ouvrir sa peau pour que le lecteur puisse l'enfiler. (Non non, ce n'est toujours pas un porno.) Et ça m'a aussi fait penser aux smiley qui, selon un commentaire plus haut, ne touchent pas chacun (mais moi un peu, parce qu'à force d'en voir, d'en lire, d'en écrire, j'me retrouve un peu dans ces symboles. Un XD peut faire passer beaucoup d'émotions, selon mon expérience personnelle. Ça ne m'étonne pas que certains auteurs réemploie les smileys tels quels pour les coller sur la tête de leur personnage et en avant la rigolade. (Je trouve cette parenthèse bien trop longue, j'ai peur d'avoir perdu votre lectorat.)).

    J'ai également imaginé, mais cela devait sans doute être involontaire de vot' part, Giraud qui, n'arrivant pas à exprimer tout ce qu'il voulait par le réalisme en s'appelant Gir ou Giraud, décide à changer de nom pour s'appeler Moebius. Parce que tout devient plus simple quand on s'appelle Moebius. Et j'me suis dit que blague à part, on était pas loin de la vérité. (Et que j'allais p'têt bien commencer à envisager mon changement de nom...)

    Au-delà de tout cela, je tiens à dire que je suis d'accord pour vous suivre sur la voie de "p'têt qu'il faudrait pas trop prendre le réalisme comme style favoris pour faire de la BD". Mais j'y mets également des réserves. Le réalisme ressemble à un cul-de-sac, mais un cul-de-sac avec des poubelles où si l'on fouille, on peut trouver des os à mâcher. (L'exemple est pas très flatteur.) Le réalisme graphique amène nombre contraintes et risques. Et lorsque j'entends ça, j'entends comme le son d'un défi. Un dessin réaliste et grave accompagné d'un scénario fluet, ça peut donner un décalage absurde. J'imagine à partir de ça qu'il est possible de faire plein de chose bien MALGRÉ et GRÂCE (en même temps) à un dessin ultra-réaliste, car c'est une BD. Et qu'une BD a cette possibilité de ne pas être uniquement basée sur son dessin, mais sur un enchaînement (je vous rappelle que la bande dessinée est une femme qui marche. Hein. Au cas où vous ne l'auriez jamais lu. Y a un blog plutôt sympa qui en parle, vous devriez essayer.) et également sur une possible alliance texte/image. (C'est tout que de la juxtaposition : image/image ; image/texte ; texte/texte. Tout s'enchaîne tout s'allie rien ne se perd.)

    BREF, je dis ça, je m'épanche bien trop longuement sur quelque chose dont vous aurez sans doute science à apporter. Et il y aurait encore d'autres choses bien intéressantes à dire (c'est-à-dire des choses que moi je trouverais intéressantes à discuter), mais le temps file, et au lieu de parler BD, il faudrait pas oublier d'en faire.

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    1. Tout ceci est finalement très vrai : réaliste, pas réaliste, ça dépend de ce qu'on en fait. Je suis d'accord.

      C'est juste que j'ai toujours cette sale impression que le dessin plus schématique est accueilli avec froideur par une grande part du lectorat de bande dessinée par simple réflexe réactionnaire ("qu'est-ce que c'est que ces gribouillis, mon fœtus en fait autant") et que ça me saoule.

      Du coup, j'essaye de rétablir la grande balance cosmique en disant encore plus de bien des dessins moins précis (et du mal de Largo Winch, mais, ça, c'est normal).

      Est-ce que ça fait des posts intelligents ? Certes non. Mais ça défoule.

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    2. Oh si si, ça en fait des posts intelligents. Je pense simplement que ce n'est pas le graphisme réaliste qu'il faut viser, mais une bande dessinée qui se veut presque péplum ou film hollywoodien. (XIII > Jason Bourne , Largo Winch > Largo Winch, Bourgeon > Cléopâtre (de 1963 avec Elizabeth Taylor ? J'sais pas, c'était simplement pour étayer mes exemples.))

      Bon, en réfléchissant un peu, je suis pas d'accord avec ce que je dis. Je ne pense pas que ces BD tentent de ressembler volontairement à des péplums ou films hollywoodiens. Le plus souvent, c'est les films qui reprennent soit des BD, soit des romans, qui ont eux-même influencés les BD. Du coup je dirais peut-être que le fléau sont les BD qui tentent de ressembler à des romans illustrés. Plein de textes explicatifs, plein de dialogues ankylosés, des dessins qui se voudraient être aussi réalistes que ce qu'on imaginerait en lisant un roman avec des personnages réalistes... (Avec un roman, on n'a que des mots pour essayer de créer un univers d'aventures cohérent, alors on va tabler sur le réalisme. Alors qu'avec une BD, on peut se permettre de quitter la réalité, le dessin est là pour garder l'univers cohérent. (Grâce à la gravité, notamment, comme vous le dites.))

      (Et là ça m'embête parce qu'en fait, je regarde quelques pages Google de Bourgeon, et il fait des compositions faites pour la BD, avec des cases enchâssées, des trucs, des machins), du coup c'est pas simplement un roman illustré, comme l'a fait Stéphane Houet avec sa Recherche du Temps Perdu (beh). Mais je pense que c'est quand même vers cette voie du "trop proche du roman, trop proche du cinéma" qu'il faut chercher un coupable. (Parce que c'est plus simple de chercher un coupable.))

      Bref, je comprends cette envie de défendre la bande dessinée vue comme simpliste alors que simplement simplifiée. J'ai simplement du mal à voire le contraire de cette bande dessinée en celle aux dessins réalistes.

      (Je m'égarerai bien encore à lister des exemples de BD réalistes intéressantes (Schuiten, par exemple, en y réfléchissant bien), et d'autres affreuses, les confronter à des au dessin humoristique bonnes et mauvaises, tapant légèrement sur Groensteen (légèrement hein, il a quand même essayer de donner au "neuvième art" d'immenses lettres de noblesse) pour avoir séparer à l'époque le dessin réaliste et humoristique.)

      (Voyez, si ça n'était pas un post intelligent, je n'aurais pas tant envie de m'épancher sur le sujet. Et je ne ferais pas de commentaires si futiles aux longueurs paragraphées. Et ça serait peut-être mieux pour tout le monde. Vous devriez songer à écrire des articles bêtes et méchants.)

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    3. Ha mais c'est fort possible e faire de la belle BD bien réaliste.

      Bourgeon, je lui tape dessus juste à cause de ces cases-nichons. Ca me bloque, les nichons.

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  6. C'est juste que j'ai toujours cette sale impression que le dessin plus schématique est accueilli avec froideur par une grande part du lectorat de bande dessinée par simple réflexe réactionnaire ("qu'est-ce que c'est que ces gribouillis, mon fœtus en fait autant") et que ça me saoule.

    Je crois que c'était vrai il y a une dizaine d'années, malheureusement je pense que maintenant il y a aussi la tendance inverse dans la nouvelle génération : "le dessin réaliste poua ! c'est trop ringard"
    Personnellement j'aime les deux approches et je trouve ces querelles de chapelle sans réel fondement vis à vis de la qualité ou non qualité des albums.

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    1. Rhalala, tout ceci est bien subjectif et chacun voit midi à sa porte et un tiens vaut mieux que deux tu l'auras et Noel au balcon, Pâques au tison.

      Bref, tout ça pour dire qu'il faudra que je sois plus mesuré à l'avenir. (Sauf sur Largo Winch, faut pas déconner non plus.)

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