Lewis Trondheim nous montre que ce qui construit un récit, ce sont des personnages SURTOUT PAS cools.
Une fois qu'on a compris que les personnages peuvent se trouver au centre du dispositif dramatique d'une œuvre artistique narrative en permettant la jonction des différentes idées d'un auteur (moi aussi je peux faire des phrases qui calment tout le monde, y a pas de raison), il faut ensuite comprendre ce qu'est un BON personnage permettant de joindre EFFICACEMENT les différentes idées de l'auteur.
Or, en général, un bon personnage, c'est surtout un personnage malléable. Qu'on peut adapter à différentes situations pour justement passer de l'une à l'autre avec souplesse.
Du coup, un bon personnage est un personnage PAS COOL.
PRENONS IRON MAN (DANS LES FILMS).
Iron Man est un personnage idéalisé.
Il est super riche, il est super rigolo, il vit seul dans une très grande baraque, il en a rien à foutre des conventions, il en a rien à foutre des gouvernements, c'est trop un James Dean du XXI° siècle.
SEULEMENT CETTE COOLITUDE EST UN PIÈGE.
Puisque Iron Man se définit par sa coolitude, il y reste figé et ne peut pas en sortir. Il doit éviter toute situation qui le ferait passer pour un mec pas cool. Ce qui revient à dire qu'il doit éviter à peu près toutes les situations du monde qui n'impliquent pas de combattre de gros monstres verts ou violets. Ce qui revient à dire qu'il ne fait rien dans la vie. (Ni aller chez Carrefour acheter des chips, ni se balader dans la rue pour acheter des Mephisto, ni conduire, ni parler à des gens, ni rien).
MAIS COMMENT SE HÉROS FAIT-IL POUR RESTER UN HÉROS ?
Les réalisateurs ont trouvé une solution simple pour conserver la coolitude de Iron Man : ils ont simplement occulté complètement les conséquences des actes du personnage.
Iron Man sauve la planète d'une invasion alien = cool.
Les capitales du monde sont toutes à demies rasées et tous les pays ruinés = pas cool. Bon, bah on a qu'à dire que New York est toute reconstruite au prochain épisode, du coup. (Attendez, les gars, on arrive pas à accueillir vingt mille pélos venus de Syrie, vous croyez vraiment qu'on serait capable de ne pas complètement effondrer notre économie en cas d'invasion alien ?)
On a encore une fois affaire à des nullos qui se ratent (et n'arrivent même pas à fuir, cette fois-ci), pour favoriser cette fois la transition entre deux scènes de manière réaliste, fine et discrète (le temps écoulé durant le transport des prisonniers est réaliste, la volonté de s'évader est compréhensible, l'échec se défend, on est pas tous des super héros qui savons où tirer dans un camion pour qu'il s'arrête).
EN FAIT, SI LE NOMBRE D'ACTIONS D'UN PERSONNAGE DÉFINI EST LIMITÉ, LE NOMBRE DE RÉACTIONS À CE PERSONNAGE EST BIEN PLUS RICHE.
Encore une fois : crédibilité (de situations aux conséquences réalistes), identification (à des personnages plus sympas et plus proches de nous que des demis-dieux), et SURPRISE (c'est toujours bien de se faire surprendre dans un récit, de se dire que l'auteur est plus fort que nous et qu'on ne sait pas où le récit va aller et que ça vaut donc le coup de le lire).
ON REMARQUERA D'AILLEURS QUE IRON MAN NE DIALOGUE JAMAIS.
Un personnage qui balance des punch lines = cool.
IL SE CONTENTE DE BALANCER DES PUNCH LINES À LA CON.
(Pour ceux qui savent pas, les punch lines, c'est comme les one-liners.) (Pour ceux qui savent pas, les one-liners, c'est comme des tag lines drôles.) (Pour ceux qui savent pas, les tag lines, c'est comme des catch phrases courtes.) (Pour ceux qui savent pas, les catch phrases, c'est comme des buzz words en longs.) (Je crois qu'on s'éloigne du sujet.) Je disais donc que les personnages qui balancent des punch lines (des petites vannes courtes qui cassent le personnage antagoniste, coupent court à la conversation, et ne provoquent surtout pas de réaction (mais simplement l'arrêt net de la conversation)), le font pour rester cool et pour éviter toute réaction qui nuirait à sa coolitude.
Ça ne va pas plus loin. Parce que n'importe quelle réaction risquerait justement de les faire sortir de cette pose, et de compliquer / nuancer / complexifier / intensifier le scénario. Et la complexité ! Ha ha ! Non merci.
(C'est une sorte de cercle vertueux : Iron Man est cool parce qu'il balance de la punchline, et, en plus, ces punchlines l'immunisent contre toute non-coolitude extérieure.)
FACE À L'IMMUABILITÉ DU PERSONNAGE IDÉALISÉ, LA FLUIDITÉ DES RÉACTIONS DE HÉROS PLUS HUMAINS.
A contrario, les personnages moins grands, moins beaux, mais plus humains et plus souples permettent de mieux progresser dans un récit.
Puisqu'on croit à ces personnages, on croit à leurs réactions. Puisqu'on croit à leurs réactions, on croit aux personnages. Puisque leurs réactions sont intéressantes, on veut bien les suivre jusqu'au bout. Puisqu'on veut les suivre jusqu'au bout, on est passionné par le déroulé de l'intrigue.
En sus, les différentes réactions des différents personnages vont permettre de fluidifier, d'articuler, de construire les différentes idées et images constitutives de la dramaturgie.
ENTRE AUTRE, LES PERSONNAGES VONT PERMETTRE :
- D'introduire le récit.
- De le développer et l'épanouir.
- Et même d'improviser sur les bases précédemment construites.
Lewis Trondheim et Brigitte Findakly, Les formidables aventures de Lapinot - la couleur de l'enfer, Dargaud.
Or, en général, un bon personnage, c'est surtout un personnage malléable. Qu'on peut adapter à différentes situations pour justement passer de l'une à l'autre avec souplesse.
Du coup, un bon personnage est un personnage PAS COOL.
PRENONS IRON MAN (DANS LES FILMS).
J'ai des lunettes moches, un bouc bizarre, et un nœud de cravate légèrement desserré. Je suis donc cool.
Iron Man est un personnage idéalisé.
Il est super riche, il est super rigolo, il vit seul dans une très grande baraque, il en a rien à foutre des conventions, il en a rien à foutre des gouvernements, c'est trop un James Dean du XXI° siècle.
SEULEMENT CETTE COOLITUDE EST UN PIÈGE.
Puisque Iron Man se définit par sa coolitude, il y reste figé et ne peut pas en sortir. Il doit éviter toute situation qui le ferait passer pour un mec pas cool. Ce qui revient à dire qu'il doit éviter à peu près toutes les situations du monde qui n'impliquent pas de combattre de gros monstres verts ou violets. Ce qui revient à dire qu'il ne fait rien dans la vie. (Ni aller chez Carrefour acheter des chips, ni se balader dans la rue pour acheter des Mephisto, ni conduire, ni parler à des gens, ni rien).
MAIS COMMENT SE HÉROS FAIT-IL POUR RESTER UN HÉROS ?
Les réalisateurs ont trouvé une solution simple pour conserver la coolitude de Iron Man : ils ont simplement occulté complètement les conséquences des actes du personnage.
Iron Man sauve la planète d'une invasion alien = cool.
Les capitales du monde sont toutes à demies rasées et tous les pays ruinés = pas cool. Bon, bah on a qu'à dire que New York est toute reconstruite au prochain épisode, du coup. (Attendez, les gars, on arrive pas à accueillir vingt mille pélos venus de Syrie, vous croyez vraiment qu'on serait capable de ne pas complètement effondrer notre économie en cas d'invasion alien ?)
Une petite attaque de rien du tout.
Une poursuite de bagnole avec 25 voitures qui finissent à la casse = cool.
Un procès et des amandes en pagaille pour avoir provoqué tous ces accidents et avoir cassé le col du fémur d'une petite vieille = Pas cool. On montre pas.
OUI, BON, IRON MAN OCCULTE LES CONSÉQUENCES DE SES ACTES. EST-CE QUE C'EST SI MAL QUE ÇA (JE VEUX DIRE, EN DEHORS DE MORALEMENT) ?
Alors que pourtant c'est très rigolo, des voitures qui se rentrent dedans.
Un personnage milliardaire qui vit tout seule dans une grande baraque isolée = cool.
Un personnage qui va toute la semaine à son boulot assister à des réunions de comité d'entreprise interminables avec que des discussions ayant comme sujet l'évolution du point d'indice inverse avant de rentrer dans sa baraque certes immense mais pleine de solitude = pas cool. On a qu'à juste parler de l'aspect milliardaire de la chose alors...
Au passage, les films qui arrivent à faire coexister coolitude des personnages et image nuancée
sont toujours les meilleurs. Par exemple :
C'est là que, dans la vie, il y a deux catégories de personnes : celles qui trouvent que dans le personnage immuablement cool de Iron Man, l'important, c'est qu'il soit cool (et trop gosse beau) ; et celles (comme moi, hein, vous l'aviez compris mais je précise aux deux du fond) qui trouvent que le problème, c'est qu'il est immuable (c'est à dire chiant, prévisible, et narrativement limité).
PAR CONTRE EXEMPLE.
PAR CONTRE EXEMPLE.
Lewis Trondheim fait toujours de ses personnages des gens pris dans les contingences de la vraie vie. Il insiste bien sur le fait que ce sont de vrais gens qui ont à subir les vraies conséquences (crédibles) de leurs vrais actes (motivés).
Hé ouais, un truc tout con, mais on peut pas forcément foncer dans une grille si facilement.
Ou menacer des gens si facilement.
Ou être un héros tout cliché si facilement.
Cette non-coolitude de la situation (ils se ratent et sont un peu nuls et fuient) permet une action drôle, inattendue, et novatrice. C'est déjà pas si mal. EN PLUS les personnages ne sont justement pas comme Iron Man, ils se rabaissent, et semble plus proches de nous. Cela favorise l'identification.
Et, paradoxalement, là encore, cela renforce le réalisme, la crédibilité des situations.
Lewis Trondheim n'essaye pas de suspendre notre incrédulité, comme la plupart des auteurs le font. Au contraire. Il la renforce. Il renforce la crédibilité des actions, des réactions, et des conséquences des actes des personnages. Pas de « on a qu'à dire que c'est facile de défoncer un portail avec une voiture », ou de « on a qu'à dire que le lapin est un être humain ». Non. Tout les choix narratifs sont ensuite assumés avec leurs conséquences logiques.
MIEUX !
Les personnages ne peuvent pas faire un truc sans avoir à réfléchir aux conséquences (ce qu'on fait tous, hein, sauf Iron Man, parce qu'Iron man, il est trop cool, tu vois, il pète des trucs et s'en va dans le soleil couchant pécho Pepper Potts) (ce qui se comprend, ceci dit).
Lewis Trondheim s'amuse même à confronter ses personnages au fait qu'ils sont des animaux et pas vraiment des êtres humains.
Et, paradoxalement, là encore, cela renforce le réalisme, la crédibilité des situations.
Lewis Trondheim n'essaye pas de suspendre notre incrédulité, comme la plupart des auteurs le font. Au contraire. Il la renforce. Il renforce la crédibilité des actions, des réactions, et des conséquences des actes des personnages. Pas de « on a qu'à dire que c'est facile de défoncer un portail avec une voiture », ou de « on a qu'à dire que le lapin est un être humain ». Non. Tout les choix narratifs sont ensuite assumés avec leurs conséquences logiques.
MIEUX !
Les personnages ne peuvent pas faire un truc sans avoir à réfléchir aux conséquences (ce qu'on fait tous, hein, sauf Iron Man, parce qu'Iron man, il est trop cool, tu vois, il pète des trucs et s'en va dans le soleil couchant pécho Pepper Potts) (ce qui se comprend, ceci dit).
Rahlala, et voilà, on se prend le chou et on arrive à rien. Iron Man, il t'aurait tout pété ça dans la gueule.
On a encore une fois affaire à des nullos qui se ratent (et n'arrivent même pas à fuir, cette fois-ci), pour favoriser cette fois la transition entre deux scènes de manière réaliste, fine et discrète (le temps écoulé durant le transport des prisonniers est réaliste, la volonté de s'évader est compréhensible, l'échec se défend, on est pas tous des super héros qui savons où tirer dans un camion pour qu'il s'arrête).
EN FAIT, SI LE NOMBRE D'ACTIONS D'UN PERSONNAGE DÉFINI EST LIMITÉ, LE NOMBRE DE RÉACTIONS À CE PERSONNAGE EST BIEN PLUS RICHE.
Encore une fois : crédibilité (de situations aux conséquences réalistes), identification (à des personnages plus sympas et plus proches de nous que des demis-dieux), et SURPRISE (c'est toujours bien de se faire surprendre dans un récit, de se dire que l'auteur est plus fort que nous et qu'on ne sait pas où le récit va aller et que ça vaut donc le coup de le lire).
Il l'avait pas vu venir celle là, hein ! Ha ha ! Bin vous non plus.
ON REMARQUERA D'AILLEURS QUE IRON MAN NE DIALOGUE JAMAIS.
Un personnage qui se fait embringuer dans une discussion sans fin pour arriver à vraiment développer ses arguments tout en comprenant ceux de son adversaire = Pas cool du tout, carrément chiant, même.
Un personnage qui balance des punch lines = cool.
IL SE CONTENTE DE BALANCER DES PUNCH LINES À LA CON.
(Pour ceux qui savent pas, les punch lines, c'est comme les one-liners.) (Pour ceux qui savent pas, les one-liners, c'est comme des tag lines drôles.) (Pour ceux qui savent pas, les tag lines, c'est comme des catch phrases courtes.) (Pour ceux qui savent pas, les catch phrases, c'est comme des buzz words en longs.) (Je crois qu'on s'éloigne du sujet.) Je disais donc que les personnages qui balancent des punch lines (des petites vannes courtes qui cassent le personnage antagoniste, coupent court à la conversation, et ne provoquent surtout pas de réaction (mais simplement l'arrêt net de la conversation)), le font pour rester cool et pour éviter toute réaction qui nuirait à sa coolitude.
Ça ne va pas plus loin. Parce que n'importe quelle réaction risquerait justement de les faire sortir de cette pose, et de compliquer / nuancer / complexifier / intensifier le scénario. Et la complexité ! Ha ha ! Non merci.
(C'est une sorte de cercle vertueux : Iron Man est cool parce qu'il balance de la punchline, et, en plus, ces punchlines l'immunisent contre toute non-coolitude extérieure.)
FACE À L'IMMUABILITÉ DU PERSONNAGE IDÉALISÉ, LA FLUIDITÉ DES RÉACTIONS DE HÉROS PLUS HUMAINS.
Les idées trop pures, les personnages trop beaux, sont le piège classique dans lequel ne pas tomber pour que la glu (les personnages) puisse réussir à coller les... euh... punaise, attendez, on va arrêter les métaphores à la con deux secondes pour pas faire de la merde.
A contrario, les personnages moins grands, moins beaux, mais plus humains et plus souples permettent de mieux progresser dans un récit.
Puisqu'on croit à ces personnages, on croit à leurs réactions. Puisqu'on croit à leurs réactions, on croit aux personnages. Puisque leurs réactions sont intéressantes, on veut bien les suivre jusqu'au bout. Puisqu'on veut les suivre jusqu'au bout, on est passionné par le déroulé de l'intrigue.
En sus, les différentes réactions des différents personnages vont permettre de fluidifier, d'articuler, de construire les différentes idées et images constitutives de la dramaturgie.
ENTRE AUTRE, LES PERSONNAGES VONT PERMETTRE :
- D'introduire le récit.
- De le développer et l'épanouir.
- Et même d'improviser sur les bases précédemment construites.
TOUT CE QUE J'ESSAYERAIS DE MONTRER DANS LES PROCHAINES SEMAINES.
Voilà ce qu'on fait aux personnages comme Iron Man dans les bandes dessinées de Lewis Trondheim :
on les entoure de peinture rose. Ça fait froid dans le dos.